Le problème nord-coréen.

Publié le par Jimoni

L'actualité internationale de ces derniers-jours est marquée par les essais balistiques et nucléaires de la Corée du Nord. En effet, les derniers essais balistiques montreraient que la Corée du Nord serait capable d'atteindre une large portion du territoire américain. De plus, le dernier essai nucléaire souterrain a été particulièrement puissant, laissant supposé que la Corée du Nord est bel et bien en possession de la bombe H. Mais, il serait idiot de croire que le problème date d'aujourd'hui. Le problème est juste plus "grave" qu'auparavant. Avant, la Corée du Nord était capable d'atomiser la Corée du Sud. Aujourd'hui, elle peut envoyer ses bombes bien plus loin. Dans tous les cas, les Etats-Unis ont comme responsabilité la protection de ses alliés de l'Asie-Pacifique : la Corée du sud, et le Japon. La menace était pour elle indirecte, désormais elle est directe. Mais, fondamentalement, le problème reste le même, et il reste toujours aussi compliqué à résoudre.

Je considère que le contexte est connu par tout le monde, je ne vais parler ici que du problème tel qu'il se présente actuellement. D'un côté, il y a les Etats-Unis et ses alliés qui veulent que la Corée du Nord cesse son programme nucléaire. D'un autre côté, la Chine souhaite garder la Corée du Nord comme zone de tampon entre les forces américaines en Corée et la frontière chinoise. Mais, la Chine n'approuve guère le programme nucléaire nord-coréen qui attise les tensions en Corée et qui tend à remettre en cause le statu quo.

Enfin, du côté nord-coréen, on a peur de deux choses : d'une insurrection, ou d'une intervention étrangère. L'arme nucléaire permet de résoudre les deux problèmes : dissuader les ennemis de la Corée du Nord, et fédérer les nord-coréens autour d'un projet. Mais, il n'y a pas que cela. La propagande nord-coréenne n'a jamais montré un signe de faiblesse, même avant le premier essai nucléaire nord-coréen en 2006. De même, une intervention étrangère était difficile à envisager du fait de l'alliance militaire entre la Chine et la Corée du Nord. En fait, au-delà de ces deux peurs, la Corée du Nord souhaite deux choses.

Premièrement, amener la Corée du Sud et les Etats-Unis sur la table des négociations pour reconnaître à la Corée du Nord comme une puissance nucléaire et pour trouver une solution politique au conflit intercoréen dans le sens de la sanctuarisation du régime nord-coréen. Sauf que les Etats-Unis ne veulent pas négocier tant que la Corée du Nord poursuit son programme nucléaire.

Secondement, la Corée du Nord veut certainement prendre son indépendance vis-à-vis de la Chine. Cette politique d'indépendance s'illustre d'abord par la volonté du régime de posséder d'une force nucléaire. Elle s'illustre aussi la nouvelle politique économique de la Corée du Nord. Kim Jong-Un a, en effet, commencé à libéraliser l'économie, ce qui permet à la Corée du Nord d'atteindre un niveau de croissance estimé à 3% par la Banque de Séoul. L'économie nord-coréenne est certes autarcique, mais 90% de ses exportations sont à destination de la Chine. En fait, la vérité est que sans la bombe et sans une économie performante, il suffit d'un revirement de la Chine (pour une raison quelconque) pour que le régime nord-coréen vole en éclat.

Ainsi, quelles sont les solutions au problème nord-coréen ? Donald Trump a proposé le feu et la colère. Décision absurde. Même avec une première frappe, il suffit d'une bombe nord-coréenne qui explose à Séoul ou à Tokyo pour provoquer la mort de millions de personnes, entraînant des conséquences terribles. Sans oublier que la Chine fera tout pour conserver sa précieuse zone de tampon. Le problème nord-coréen n'est pas un nœud gordien. On ne peut pas le dénouer en le tranchant d'un coup d'épée, car le risque serait un violent départ d'incendie.

Plus sagement, les autres dirigeants du monde ont préféré adopter des sanctions à l'égard de la Corée du Nord tout en recommandant à la Corée du Nord d'arrêter son programme nucléaire. Vu les enjeux, Kim Jong-Un ne cèdera pas. D'autant plus qu'il s'est engagé auprès de sa population de défendre son pays. Céder décrédibiliserait Kim. Certains émettent l'hypothèse que si la Chine décide d'arrêter le commerce des hydrocarbures avec la Corée du Nord, il serait possible que Kim Jong-Un cède parce que cela pourrait provoquer une insurrection. Mais, c'est très spéculatif :

  1. Premièrement, la population pourrait très bien vouer un culte encore plus grand à Kim Jong-Un dans l'optique d'une lutte entre la Corée du Nord et le monde entier.
  2. Deuxièmement, la Corée du Nord est un régime totalitaire qui surveille sa population et donne des avantages à l'armée. Un début d'insurrection serait écrasé dans l'œuf.
  3. Troisièmement, si une guerre civile éclate en Corée du Nord, personne ne sait comment la guerre finira. La Chine, la Russie, les Etats-Unis, le Japon, la Corée du sud : tous ses pays là risquent d'intervenir. Une guerre civile nord-coréenne signifierait le début d'un chaos dangereux et incontrôlable.

Alors que faire face à la Corée du Nord ? Stephen Bannon, l'ancien conseiller stratégique du président des Etats-Unis, constatait que la Corée du Nord tenait les Etats-Unis. De fait, pour lui, la Corée du Nord avait déjà gagné son pari. La solution serait-elle de ne rien faire ? Difficilement concevable, mais c'est peut-être une piste de réponse. Ne plus faire de mouvements militaires près de la frontière nord-coréenne, accepter la puissance nucléaire nord-coréenne de fait, tenter d'établir un lien diplomatique avec la Corée du Nord : en bref, ouvrir les bras à la Corée du Nord, pour relâcher sa vigilance. À côté, passer un accord entre les grandes puissances de la région pour éviter tout conflit à propos de la Corée. Puis attendre. Attendre que le système nord-coréen s'ouvre dangereusement, ne serait-ce qu'un petit peu. Jusqu'au jour où, par la force des choses, le système ne tienne plus, menaçant le maintien du régime. À ce moment-là, profiter de l'occasion pour donner le coup de grâce à la dynastie Kim, et appliquer l'accord convenu entre les grandes puissances. Cela prendra du temps, beaucoup de temps, et d'efforts. Ce n'est peut-être pas la solution, mais c'est une piste. Tout repose sur un accord et une diplomatie ouverte. Quand le nœud ne peut ni être trancher, ni être démêlé, peut-être faut-il le laisser pourrir ?

 

Publié dans Actualité

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